Un spectre hante l'Europe

"Un spectre hante l'Europe", disait Karl Marx. Aujourd'hui, c'est un autre spectre, plus grand et plus puissant encore, qui règne : il hante le monde, et pousse nos démocraties à céder aux sirènes du populisme. Les Etats-Unis sont tombés sous la férule d'un milliardaire à moitié fou, désireux de fermer ses frontières et de privilégier le protectionnisme. Le Royaume-Uni a fait le choix de quitter l'Europe pour rétablir ses frontières et s'isoler, en dépit du mouvement global inverse que sous-tend la mondialisation. Même la Catalogne, tout dernièrement, s'est mise en tête de prendre son indépendance, incapable de voir que la pire chose qui pourrait lui arriver serait qu'elle réussisse : ne pouvant en aucun cas intégrer l'Europe (l'UE ouvrirait la boîte de Pandore en l'acceptant, et inciterait d'autres régions à faire sécession), elle perdrait tout pouvoir et toute attractivité en l'espace de quelques mois.

Clairement, ces replis de la part de démocraties sont des retours en arrière, et d'autant plus inquiétants qu'ils vont jusqu'à faire tomber de grandes puissances telles que les Etats-Unis. Il est donc important cette réaction allergique et populiste à la mondialisation, car si l'on ne prend pas la peine de bien saisir les tenants et aboutissants de ce phénomène, l'on prend le risque d'assister à une contagion générale. Notre pays a plutôt bien résisté jusqu'à présent, mais il ne faut pas perdre de vue que Marine Le Pen est arrivée au second tour des élections présidentielles. Et que, si elle n'avait pas fait un débat calamiteux, elle aurait eu une petite chance de l'emporter. Une vue de l'esprit ? Peut-être. Mais pour rappel, presque personne n'a su prédire la victoire de Trump. Parfois, mieux vaut être prudent avant de dire ce qui est ou non impossible...